de l’amour à la mort.
« C’est trop triste, c’est pas toi ! »
« C’est quand même bizarre d’aborder un tel sujet à ton âge… »
Contrairement à ce que pourrait penser ma belle-mère, pas besoin d’être Wednesday Addams ou d’avoir 60 ans pour parler de la mort.
Loin de m’habiller tout en noir, de détester la vie ou encore d’écouter du Death Metal à longueur de journée, j’ai cependant toujours eu la tête dans les nuages et les pieds dans un « autre » monde - que celui-ci soit imaginaire ou réel, under ou aboveground.
Ce n’est donc pas la mort en soi qui m’attire mais la célébration de nos différences - c’est elle qui m’a nourrit jusqu’ici et qui me pousse aujourd’hui à créer ce projet.
il n’y a rien de plus étranges que les gens !
Pendant 10 ans, j’ai travaillé dans un univers qui ne m’était pas vraiment naturel : le mariage.
Moi qui suis allergique aux conventions, ce n’était pas du tout un domaine dans lequel je m’étais imaginée grandir - et encore moins ne me sentais vraiment à l’aise !
À ma plus grande surprise, je me suis éclatée (presque) tous les jours. Ces 10 dernières années m’ont permis d’explorer le design d’invitation et la papeterie sous toutes ses formes. J’y ai découvert une liberté de création que je n’aurais probablement jamais pu trouver ailleurs !
Plus que des bouts de papier, ce qu’on venait chercher chez moi c’était surtout l’expérience unique que je proposais : la possibilité de créer une véritable identité personnelle - une identité qui dépasse l’événement pour immortaliser l’histoire même du couple ou de l’entreprise.
Mais il me manquait quelque chose…
Car si ce que je faisais c’était célébrer la vie dans toutes ses aventures - amoureuses, familiales, entrepreneuriales - alors où était la dernière… ?
De l’amour
la mort, il n’y a qu’une seule lettre qui change.
Ça peut paraître étrange de passer d’un univers si coloré, si joyeux à un domaine perçu comme triste, morbide, voire même glauque.
Et pourtant, ça fait tellement sens !
Si la naissance est un passage. L’adolescence, l’obtention d’un diplôme, le mariage, son premier job, son dernier job, 33 ans… Toutes ces transformations sont des étapes, des moments clés de notre vie. Alors pourquoi pas la mort ?
Malheureusement, rien (ou vraiment très peu) n’est fait dans ce domaine… J’ai toujours été choquée par la froideur et le manque d’émotions qui se peut se dégager de la papeterie funéraire. Je ne comprends pas à quel point ce domaine est sous-estimé, alors que le papier a un pouvoir de connexion incroyable !
Je crois sincèrement que la force de la papeterie (que ce soit une carte, un faire-part ou même un catalogue) réside dans l’histoire qu’elle raconte. Et mon travail, en tant que designer graphique, est de façonner cette histoire à travers les techniques et les matériaux à ma disposition. Chaque détail compte : de l’enveloppe au timbre, de l’illustration au choix de la typographie, du choix du papier à la manière dont il est imprimé ou encore façonné.
Plutôt que faire du beau pour faire du beau, je cherche à créer des objets porteurs de sens - des objets qui possèdent leur propre langage et imaginaire. C’est pour cette raison que la.le destinataire fait partie intégrante de mon processus. C’est à ellui que je pense quand je crée, car c’est sous ses doigts que l’objet va prendre vie - et c’est à travers ses émotions (sourire, rire, larme…), qu’iel va lui donner un âme.
Transformer ce qui peut sembler banal en quelque chose de mémorable, pertinent ou encore poétique, c’est tout le talent caché du travail du papier - et j’en ai fait mon expertise.
Alors comment ne pas utiliser cette force pour rendre un dernier hommage ? Créer un dernier souvenir ?
Explorer le passé, questionner le présent pour mieux inspirer le futur.
Je sais que ça ne se fait pas (encore ?) mais, et si on imaginait une papeterie funéraire qui s’affiche ? Qui se partage comme on peut montrer un faire-part de mariage. Une papeterie qui fasse partie du quotidien, une sorte de Memento Mori moderne qui viendrait commémorer la fin plutôt que la cacher. Est-ce que ce ne serait pas une belle manière de garder nos proches en vie, dans nos vies ?
C’est ce que je cherche à créer en explorant les symboles du passé : questionner nos croyances, fouiller l’Histoire et réinterpréter ce qu’on a oublié pour (re)trouver des signes qui font sens et ramener de la poésie dans les rites d’aujourd’hui.
L’émotion est la clé. C’est ce qui m’inspire, mais c’est surtout ce que je cherche à inspirer en retour - que celle-ci soit joyeuse, triste ou simplement nostalgique.